Il faut stopper l'inique chasse aux chômeurs
Par Freddy Bouchez le Mardi, 24 Novembre 2009 PDF Imprimer Envoyer

L'hémorragie d'emplois consécutive à la crise se poursuit semaine après semaine, au rythme des faillites, licenciements collectifs et autres restructurations. Ce bain de sang social a lieu tous les jours dans l'indifférence des partis traditionnels. A l'injustice de se retrouver mis à la porte pour une crise dont ils ne sont pas responsables, les travailleurs/euses subissent une autre injustice en tant que chômeurs/euses: les mesures de contrôle de disponibilité et de sanctions, la fameuse « chasse aux chômeurs » . Des procédures taillées sur mesure pour le patronat et socialement criminelles à l'heure où, en Wallonie, il y a 1 offre d'emploi pour 32 demandeurs d'emploi! La FGTB wallonne a lancé une campagne pour le suppression de cette inique chasse aux chômeurs. Nous publions ci-dessous de larges extraits d'une brochure réalisée pour la FGTB-Centre par Freddy Bouchez, coordinateur de la cellule accompagnement des chômeurs de la FGTB-Centre. (Réd. LCR-Web)

ACCOMPAGNEMENT DES CHOMEURS: AIDE OU EXCLUSION?

Depuis 2004, l’activation du comportement de recherche emploi est d’application. Pour garder son droit aux allocations de chômage, les chômeurs doivent prouver qu’ils recherchent activement du travail au risque de perdre temporairement ou définitivement leur droit aux allocations de chômage. Ce système s’est couplé avec l’application de la transmission systématique d’infos du FOREM vers l’ONEM qui a fait exploser le nombre de sanctions en Wallonie.

La FGTB Wallonne a toujours affirmé son opposition à ce plan d’activation. Nous ne sommes pas contre un accompagnement des chômeurs car certains ont besoin d’aide mais nous sommes résolument contre les sanctions surtout que celles-ci touchent souvent les personnes les plus fragiles socialement.

En fait, cette activation, c’est tout bénéfice pour les patrons car elle favorise la précarisation du marché de l’emploi. Par cette activation, une pression constante est faite sur les chômeurs pour qu’ils acceptent n’importe quel travail dans n’importe quelle condition.

Alors que pour janvier 2009, le FOREM de La Louvière n’a géré que 457 emplois vacants pour un total de 22504 demandeurs d’emploi inoccupés dans la Région du Centre et qu’il y a une offre d’emploi pour 32 demandeurs en Wallonie, le gouvernement fédéral envisage de modifier la procédure d’activation en cours depuis 2004. Il s’agira de mettre complètement les chômeurs sous tutelle par une généralisation de la contractualisation du droit aux allocations de chômage et cela malgré la récession économique qui frappe durement les travailleurs (selon la Banque Nationale, le nombre de chômeurs augmentera dans le pays de 58000 unités d’ici la fin du quatrième trimestre 2009)

Les jeunes qui sortent de l’école vont être soumis à cette nouvelle procédure avant même de toucher des allocations de chômage et d’être syndiqués.

Il s’agit donc de se mobiliser plus que jamais contre ces tentatives de mise sous tutelle complète des chômeurs. Il faut revendiquer une véritable politique de créations d’emplois de qualité en suffisance. Il faut dénoncer la véritable hypocrisie qui consiste à s’émouvoir de l’augmentation de la pauvreté dans notre pays tout en malmenant celles et ceux qui ont les revenus les plus bas en les excluant du chômage.

Dans cette publication, nous allons essayer de démontrer en quoi la politique d’activation des chômeurs menée depuis 2004 est nocive pour les chômeurs et pour l’ensemble des travailleurs en donnant des exemples bien concrets. Nous analysons également la nouvelle procédure envisagée par le gouvernement fédéral : à notre sens, celle-ci risque de produire encore plus d’exclusions. En tout cas, il paraît évident qu’elle n’aidera pas les chômeurs à trouver un emploi de qualité.

EVALUATION QUALITATIVE DE L’APPLICATION DU PLAN D’ACTIVATION DES CHOMEURS DEPUIS JUILLET 2004

Depuis juillet 2004, le contrôle de la disponibilité des chômeurs sur le marché de l’emploi a pris deux formes :

1) les entretiens menés par les facilitateurs de l’ONEM : pour rappel, les chômeurs qui ont entre 15 et 21 mois de chômage sont convoqués par les facilitateurs de l’ONEM dans des entretiens où leur comportement de recherche emploi est évalué. Ils risquent une contractualisation de leur droit aux allocations de chômage et des sanctions qui peuvent être temporaires ou définitives. Le chômeur est convoqué d’abord dans un entretien 1 où les efforts de recherche d’emploi sont évalués sur les 12 derniers mois : si l’évaluation est positive, il est convocable à nouveau 16 mois plus tard pour un nouvel entretien mais si l’évaluation est négative, il doit signer un contrat à réaliser jusqu’au moment où il sera appelé à un deuxième entretien, c'est-à-dire au plus tôt après 4 mois. Au deuxième entretien, la réalisation du contrat est évaluée : si les actions du contrat sont réalisées, l’évaluation est positive et le chômeur est convocable à nouveau 12 mois après pour un nouveau premier entretien mais si l’évaluation est négative, sanction de 4 mois et obligation de signer un deuxième contrat qui conduira à un troisième entretien au plus tôt après 4 mois. Au troisième entretien, si les actions du contrat sont réalisées, l’évaluation est positive et le chômeur sera convocable à nouveau 12 mois après pour un nouveau premier entretien mais si les actions ne sont pas réalisées et que l’évaluation est négative, ce sera l’exclusion définitive du droit aux allocations de chômage.

2) La transmission systématique d’informations du FOREM vers l’ONEM : en cas de non réponse à deux convocations du FOREM : le FOREM radie l’inscription en tant que demandeur d’emploi et transmet à l’ONEM l’information sur le fait que le chômeur ne s’est pas présenté. Dès lors, le chômeur est convoqué à l’ONEM pour une audition litige où il risque une suspension du versement des allocations de chômage pour une durée de quatre à cinquante deux semaines.

En cas de non réponse à une offre d’emploi du FOREM : le FOREM transmet à l’ONEM le fait que le chômeur n’a pas répondu à l’offre. Dès lors, il est convoqué à l’ONEM pour une audition litige où il risque une suspension du versement des allocations de chômage pour une durée de quatre à cinquante deux semaines.

Le gouvernement fédéral et l’ONEM présentent des évaluations très positives de ces procédures d’évaluation et de contrôle des chômeurs. Selon eux, elles auraient aidé un nombre important de ceux-ci à retrouver ou à trouver un emploi. Selon nous, ces dispositifs mis en place depuis 4 ans ont surtout servi à exclure du droit aux allocations de chômage des personnes déjà très fragilisées socialement. Nous constatons aussi que les mesures d’activation favorisent la précarisation du marché de l’emploi.

NOTRE EVALUATION DES ENTRETIENS ORGANISES PAR L’ONEM

Le contrôle de l’ONEM mis en place depuis 2004 a réduit considérablement le droit de défense des chômeurs :

La contractualisation du droit aux allocations de chômage limite les possibilités de contester une décision de l’ONEM. Un chômeur peut contester une décision de l’ONEM prise à son égard en déposant un recours au Tribunal du Travail ou auprès de la Commission Administrative Nationale.

Si une contestation après chaque décision de l’ONEM est possible au Tribunal du Travail, elle est rendue beaucoup plus difficile par le fait que le demandeur d’emploi est forcé de signer le contrat sous peine d’exclusion du droit aux allocations de chômage. Il est en effet plus difficile de faire valoir ses droits au Tribunal du Travail ou à la Commission Administrative Nationale quand on a déjà signé un document d’acceptation sous la forme d’un contrat.

D’ailleurs, le 9 juin 2008, la Cour de Cassation a cassé une décision favorable à un chômeur qui avait été prise par le TT de Verviers et la Cour du Travail de Liège. Selon cette cour, « le juge saisi d’un recours d’un chômeur à l’encontre d’une mesure d’exclusion prononcée par l’ONEM ne peut pas apprécier le caractère adéquat des actions consignées dans le contrat, mais doit se contenter de vérifier si le chômeur s’est, oui ou non, conformé exactement aux termes du contrat qu’il a signé. La Cour de Cassation restreint ainsi considérablement l’étendue des pouvoirs dont les cours et tribunaux compétents faisaient abondamment usage jusqu’ici » (1)

« On peut dire à ce stade que les conséquences de cet arrêt risquent d’être désastreuses pour les chômeurs activés, car elle a pour effet de réduire les pouvoirs du juge quasi à néant. Même s’il apparaît lors d’un litige consécutif à une mesure d’exclusion que les engagements consignés dans le contrat se réduisaient manifestement à une série de clauses stéréotypées, le juge saisi d’un recours devrait, à suivre la Cour de Cassation, se contenter d’examiner si ces engagements ont bien été respectés à la lettre par le chômeur, point à la ligne » (2)

La Commission Administrative Nationale se comporte un peu de la même façon que la Cour de Cassation quand elle doit décider sur les recours introduits par les chômeurs et qui sont de sa compétence. Dans la plupart des cas, elle se contente de vérifier si le chômeur a répondu action par action aux exigences du contrat de l’ONEM D’ailleurs, la CAN donne raison à l’ONEM dans énormément de cas.

Ce n’est pas étonnant quand on sait que la CAN n’est pas véritablement une commission indépendante puisqu’elle est composée en partie de représentants de l’ONEM, et de représentants des employeurs. Les organisations syndicales siègent également au sein de cette commission mais on peut aisément comprendre que l’ONEM prendra rarement une position contre lui-même et que les représentants de l’ONEM et des employeurs tombent souvent en accord.

De plus, dans la procédure actuelle, les chômeurs ne peuvent introduire un recours à la CAN qu’après le troisième entretien, c'est-à-dire quand ils ont été exclus définitivement. Un traitement équitable des recours au sein de la CAN supposerait à notre sens que cette institution soit composée de personnalités indépendantes devant lesquelles l’ONEM et les chômeurs accompagnés de leurs délégués syndicaux s’expliqueraient dans le cadre d’un rapport de force qui serait alors un peu plus équitable.

La nouvelle procédure d’activation des chômeurs élaborée par le gouvernement fédéral prévoit une généralisation de la contractualisation du droit aux allocations de chômage (voir l’analyse de cette nouvelle procédure) réduisant ainsi encore un peu plus les possibilités de défense et d’expression des chômeurs. (...)

2) L’ADMINISTRATION ADAPTE LES REGLES

Depuis juillet 2004, nous constatons que l’administration n’hésite pas à adapter les règles et le plus souvent, au détriment du chômeur. Une série de décisions ont été prises dans ce sens depuis octobre 2004 qui est la date où les entretiens ONEM ont effectivement débuté.

Les personnes qui renoncent à leur droit aux allocations de chômage sont malgré tout convoquées car l’ONEM considère qu’elles veulent ainsi échapper au contrôle pour récupérer leur droit une fois la période de contrôle dépassée. En principe, si on n’est plus chômeur indemnisé au moment de la convocation, on ne peut pas être convoqué mais l’administration de l’ONEM a imposé une série de conditions aux personnes qui renoncent à leurs allocations : Le FOREM radiant l’inscription de demandeur d’emploi, l’ONEM demande aux chômeurs concernés de faire la preuve de cette radiation.

En fait, ils doivent fournir une attestation du FOREM ainsi qu’un document de l’organisme de paiement. Dans certains cas, il a été demandé au chômeur un document de l’organisme de paiement qui atteste qu’il renonce au moins pour une période minimale de six mois à ses allocations. Tout cela paraît d’autant plus anormal que dans un cas auquel nous avons été confrontés, la personne ayant renoncé à ses droits, s’est vue imposer un contrat qu’elle ne doit pas effectuer puisqu’elle n’est plus chômeuse indemnisée. Elle ne devra effectuer les actions demandées que quand elle retrouvera son droit aux allocations de chômage.

Au vu de ces pratiques, on peut se demander jusqu’où ira le pouvoir de l’ONEM ? L’administration compte t’elle dès lors convoquer tous les demandeurs d’emploi libres pour autant qu’ils aient été indemnisés à un moment donné ?

Délais qui apparaissent pour certaines actions du contrat : Dans les contrats, on voit apparaître des délais pour certaines actions. En effet, certains facilitateurs imposent par exemple aux chômeurs de s’inscrire dans des agences intérimaires dans les 30 jours. Pour certaines actions, le délai est de les réaliser dans les 10 jours. Cela ne correspond pas au contenu de l’arrêté royal.

Selon l’ONEM, ce dernier indique que la personne est convoquée au minimum après quatre mois pour un second ou troisième entretien et dès lors, le délai pour réaliser les actions devrait aller jusqu’ à la date proposée par l’ONEM pour le prochain entretien. Ces balises permettent aux facilitateurs d’être encore plus exigeants par rapport aux chômeurs et pourquoi pas d’envisager des sanctions si les actions n’ont pas été réalisées dans les délais impartis. Encore une fois, il nous semble que les chômeurs les plus fragilisés socialement risquent de faire les frais de ces exigences supplémentaires.

Les travailleurs à temps partiel et à ½ temps avec AGR (allocation de garantie de revenus) sont convoqués au second et au troisième entretien.

Les demandeurs d’emploi en contrat de travail à temps partiel et à ½ temps avec l’AGR sont malgré tout convoqués au second ou troisième entretien alors que le premier entretien, quant à lui ne peut pas se tenir. Cette façon de pratiquer est appliquée depuis la fin de l’année 2007.

Nous ne comprenons pas cette différence faite entre le premier et les deux autres entretiens depuis 2007. Dès qu’une personne travaille, même à temps partiel, il nous semble assez opportun de dire que le contrôle de l’ONEM ne peut avoir lieu surtout que le fait de percevoir l’AGR indique bien que le chômeur ne choisit pas le temps partiel de manière volontaire.

Les chômeurs ne sont pas non plus responsables de la qualité des offres disponibles sur le marché de l’emploi. Les propositions de contrats de travail à temps partiel se sont multipliées et très souvent, le demandeur d’emploi accepte ces conditions par défaut de temps plein. Ce n’est pas ici le chômeur qu’il faudrait viser mais bien la qualité des contrats de travail proposés par les employeurs publics et privés.

De surcroît, le fait d’avoir trouvé un boulot et de travailler effectivement, c’est faire plus que ce que la loi demande. Trouver et travailler, c’est quand même la preuve la plus probante de disponibilité. Il n’est pas admissible qu’un certain nombre de travailleurs à temps partiel aient été effectivement sanctionnés par l’ONEM.

De même, à plusieurs reprises, il est arrivé que des personnes ayant travaillé de façon significative sur la période évaluée soient malgré tout contractualisées ou sanctionnées lors de leur second ou troisième entretien. Cette situation est également tout à fait anormale car c’est en ayant trouvé et travaillé que ces chômeurs ont fait la preuve de leur disponibilité sur le marché de l’emploi. (...)

4) LES MESURES DE CONTRÔLE FAVORISENT L’EMPLOI PRECAIRE

Dans une évaluation réalisée en septembre 2005, nous avions signalé le lien qui existe entre les mesures de contrôle et l’emploi précaire. Ces dernières années, la majorité des nouveaux emplois créés sont des contrats à durée déterminée où l’on n’est plus toujours payé en fonction de sa qualification.

Dans les entreprises privées et publiques, la part de CDD et de sous statuts a considérablement augmenté. Les agences intérimaires ont pris une place considérable sur le marché de l’insertion socioprofessionnelle. Beaucoup de secteurs de l’économie font appel à elles pour embaucher. L’objectif des mesures de contrôle appliquées par l’ONEM et décidées par le gouvernement fédéral est de coller à cette évolution du marché de l’emploi.

Le but n’est pas de créer des emplois mais de faire travailler dans des conditions de flexibilité qui conviennent au patronat. La récession économique nous montre que les employeurs peuvent ainsi utiliser cette main d’œuvre précaire comme ils l’entendent : De nombreux intérimaires ont été utilisés pendant plusieurs années par les entreprises dans les périodes de plus haute conjoncture économique et aujourd’hui, ils sont les premiers jetés dehors, sans perspective, par ces mêmes entreprises. Pour que les chômeurs acceptent cette précarisation des contrats de travail, il faut rendre le droit aux allocations de chômage moins confortable. C’est à cet objectif que s’attellent les mesures de contrôle appliquées par l’ONEM.

Dans les contrats ONEM, des actions d’inscription aux agences intérimaires sont rendues obligatoires. Bien souvent, il est demandé aux chômeurs de suivre les offres des agences, de répondre à celles qui correspondent à leurs qualifications et de justifier pour quelles raisons ils répondent positivement ou négativement aux propositions. Dès lors, des chômeurs auront plutôt tendance à accepter les propositions des intérims plutôt que de devoir justifier un refus à l’ONEM, sans compter que certaines agences n’hésitent pas à dénoncer ce qu’elles considèrent comme étant des refus d’emplois.

Les conséquences sont importantes : un jeune devra au moins passer par plusieurs CDD avant de pouvoir accéder à une stabilité d’emploi pour une longue période. Il aura aussi plus de mal à envisager un projet de vie sur le long terme. En moyenne, un jeune qui a la chance d’être inséré dans le circuit du travail, mettra au moins trois ans avant de pouvoir peut-être décrocher un contrat stable.

Dans les entreprises privées et le secteur public, le nombre de contrats précaires rend plus difficile l’implication dans les luttes collectives et revendicatives et déforce les organisations syndicales.

Face à ce système mis en place pour imposer une flexibilité accrue des conditions de travail, il conviendrait de réaffirmer notre exigence de création d’emplois stables et de qualité en suffisance.

5) LES AGENCES INTERIMAIRES ET LES EMPLOYEURS PLUS EXIGEANTS

Dans certains métiers, particulièrement les aides ménagères mais ce ne sont pas les seuls boulots concernés, l’exigence du permis de conduire et même du véhicule conduit à des refus d’inscription par les intérims. Certaines femmes signalent qu’elles sont refusées pour des emplois à cause du fait qu’elles sont mères de famille car les employeurs souhaitent une disponibilité maximale.

L’accès à l’emploi pour les jeunes demeure problématique de par l’expérience professionnelle de plusieurs années souvent exigée. Beaucoup de jeunes continuent à se plaindre de cet état de fait en disant que n’ayant pas leur chance, ils ne sont jamais mis en position d’acquérir cette expérience.

Pour les personnes qui ne sont pas encore dans les conditions de pouvoir bénéficier des plans d’aide à l’embauche, trouver un emploi, c’est quasi impossible. Pour la plupart des chômeurs, il faut donc attendre au moins une année de chômage avant d’avoir une chance réelle d’être engagé. Durant ce laps de temps, les jeunes ne peuvent pas suivre de formation avec dispense puisque la législation chômage impose après l’école de rechercher un travail durant une année avant d’envisager cette possibilité.

Il y a donc pour beaucoup de chômeurs, une année vide, sans perspective réelle sauf si on décide de suivre une formation dans un secteur dit en pénurie de main d’œuvre ou des cours dans le cadre de l’enseignement de promotion sociale. Dans ce dernier cas, puisque pas de dispense, il faut continuer à rechercher un travail et à en faire la preuve.

Selon un nombre grandissant de chômeurs, les propositions de travail en noir sont en augmentation. Phénomène récent, certaines annonces de ce type sont publiées dans les journaux. De plus en plus, les employeurs, particulièrement dans le secteur des grands magasins, font prester des journées d’essai qui servent de test avant une éventuelle embauche. Celles-ci ne sont pas rémunérées et permettent ainsi de pouvoir bénéficier d’une main d’œuvre gratuite durant parfois plusieurs jours si l’on tient compte du nombre total de candidats pour un emploi vacant. C’est une pratique qui existe déjà depuis plusieurs années et qui semble encore s’amplifier.

6) LES FEMMES ET LES MESURES DE CONTRÔLE DE L’ONEM

Dans une évaluation publiée en septembre 2005, nous disions que les femmes étaient particulièrement touchées par les mesures de contrôle. Cela reste vrai, rien ne s’est modifié.

Les femmes enceintes, même jusqu’au septième ou huitième mois sont quand même convoquées. Il est certain qu’elles ont arrêté leur recherche de travail depuis un certain temps vu qu’elles n’ont pratiquement aucune chance de se faire embaucher. Beaucoup n’ont donc plus de recherche à faire valoir depuis plusieurs mois quand elles se présentent à l’ONEM et l’évaluation aboutit le plus souvent à un contrat. Le seul changement obtenu, c’est que ce contrat pourra être effectué après le congé de maternité.

Pour les mères de famille, toujours la même exigence de trouver des solutions de garde alors que les équipements collectifs manquent crucialement pour les enfants de zéro à trois ans. Les crèches sont principalement réservées aux femmes qui travaillent et très peu de chômeuses, même quand elles le veulent, parviennent à trouver un endroit pour placer leurs enfants afin de pouvoir se libérer pour la recherche d’un travail. Souvent, les seules possibilités de garde se trouvent dans leur propre famille, auprès des grands parents. De plus, les crèches représentent un coût souvent inabordable.

L’article 90, dispense pour raison sociale et familiale est inaccessible pour les chefs de ménage qui élèvent seuls leurs enfants. Seuls les cohabitants qui vivent avec un conjoint qui travaille examinent cette possibilité car l’allocation versée durant la période de dispense est d’un peu plus de 10 EUROS par jour.

Une chef de ménage, ou plus rarement, un chef de ménage, ne peut se permettre de vivre avec une allocation aussi basse. Pourtant, beaucoup d’entre eux, auraient bien besoin d’un temps pendant lequel ils pourraient mieux s’organiser en vue de la recherche d’un emploi.

La législation reconnaît la nécessité de cette dispense mais dans des conditions de revenu inacceptables pour ces chefs de ménage (très souvent des femmes) qui élèvent seuls leurs enfants. Si l’on continue à accorder cette dispense, il faut qu’elle serve à celles et ceux qui en ont le plus besoin dans des conditions de revenu qui permettent une vie décente pour les parents et leurs enfants. Mais, il faut croire que dans l’état actuel des choses, cette dispense n’est finalement destinée qu’à faire pression pour que les femmes cohabitantes restent à la maison pour élever les enfants pendant que le compagnon travaille.

Conclusions sur l’application du plan d’activation des chômeurs menée par l’ONEM depuis juillet 2004

Il se confirme que les mesures de contrôle appliquées par l’ONEM sont une adaptation du droit aux allocations de chômage à l’évolution du marché du travail. Les emplois nouvellement créés sont des CDD dans lesquels on n’est plus toujours payé en fonction de sa qualification.

Les exigences patronales pour plus de flexibilité sont ainsi rencontrées. Il s’agit en fait de faire pression sur les chômeurs pour qu’ils acceptent des conditions de travail précaires. Il ne s’agit pas de créer des emplois mais plutôt de faire travailler dans les conditions voulues par le patronat. Cette tendance vise également à créer une pression sur l’ensemble des travailleurs et sur les salaires pour faire baisser le coût du travail.

Les exclusions dues à ces mesures touchent principalement les catégories de chômeurs les plus fragilisés socialement, celles et ceux qui ont de grandes difficultés, qui ont été peu scolarisés et qui ont le moins de moyens pour rechercher un travail. Ce sont ceux là dont les évaluations aboutissent le plus souvent à un contrat et qui sont donc effectivement sanctionnés.

Depuis septembre 2005, l’attitude de l’administration centrale de l’ONEM s’est modifiée. Sur plusieurs points, celle-ci a adapté l’application de la réglementation dans un sens plus restrictif. Même les personnes qui travaillent ne sont pas à l’abri d’une exclusion temporaire ou définitive.

QUELQUES CHIFFRES SUR L’EVOLUTION DES SANCTIONS AU NIVEAU FEDERAL

Le plan d’activation du comportement de recherche d’emploi (dit aussi plan d’accompagnement et de suivi des chômeurs) a, depuis 2004, abouti à un nombre important d’exclusions du droit aux allocations de chômage. Pour les seuls entretiens à l’ONEm, cela représente 8.713 diminutions et 15.336 suspensions pour une durée de 4 mois et 8.128 exclusions définitives.

Par ailleurs, une vertigineuse augmentation de 256% (cf. tableau ci-dessous) des exclusions dites « litige » (pour une durée de 4 à 52 semaines) a été constatée.

                 Nombre d’exclusions « litige »         Nombre de semaines d’exclusion

                ---------------------------------           ------------------------------------

2004                   23.179                                              178.180

2007                   40.793                                              456.007

 

La principale raison de cette recrudescence est la transmission fortement accrue de données des organismes régionaux (FOREm, Actiris, VDAB) vers l’ONEm : 6.645 des litiges de 2005, 11.053 de ceux de 2006, 20.863 de ceux de 2007 et 22.633 de ceux de 2008.

Au 31 décembre 2008, 9.301 personnes étaient en article 70, c’est-à-dire suspendues de paiement de leurs allocations suite à une non-présentation aux convocations de l’ONEM dans le cadre de la dispo (aux dires des accompagnateurs syndicaux, qui assurent l’information et l’accompagnement des travailleurs sans emploi face aux contrôle de l’ONEM, ce groupe est principalement composé d’individus extrêmement précarisés). Il ne s’agit ici que de personnes dont la suspension court toujours, parfois depuis longtemps (au total il y a eu 13.154 suspensions « article 70 » prononcées en 2008). (...)

Cette évolution vers plus de sanctions limitées et définitives tient au fait que l’ONEM a amplifié les exigences par rapport aux chômeurs. Les évaluations deviennent de plus en plus administratives et tatillonnes…L’ONEM attachant plus d’importance aux preuves (copie de lettres et des offres par exemple) qu’à la réelle volonté du chômeur de rechercher bien concrètement un emploi.

Il est d’ailleurs à signaler qu’il est plus probant pour l’ONEM de respecter un contrat à la lettre dans les temps impartis que d’avoir travaillé ou suivi une formation de qualité. Ces derniers mois, des personnes ont été sanctionnées malgré des projets concrets ou des périodes de travail car, malheureusement, les périodes de travail se situaient « un peu hors période évaluée » C’est ainsi qu’une personne ayant travaillé 5 mois à temps plein avant de se présenter à son troisième entretien à l’ONEM a été exclue définitivement. Dans ce système très administratif et procédurier, ce sont aussi les chômeurs les plus fragiles socialement qui sont exclus… La chasse aux chômeurs est bel et bien une réalité !

UN NOUVEAU PLAN EST TOUJOURS PENDANT

Sur base de l’évaluation produite par IDEA Consult et de rencontres multiples qui ont eu lieu au cabinet de la ministre de l’emploi, au sein du comité de gestion de l’ONEM et de consultations avec les entités fédérées, un nouveau plan d’activation des chômeurs a été proposé par le gouvernement fédéral.

Les perspectives annoncées par Joëlle Milquet vont dans le sens d’une généralisation de la contractualisation du droit aux allocations de chômage. Globalement, ces propositions renforcent le caractère contraignant et répressif du PAC même si des dispenses d’application ou suspension de la procédure concerneront des catégories bien spécifiques de chômeurs. Ce projet a capoté lors des négociations avec les régions en juillet 2008, mais en novembre dernier, dans son « plan pour l’emploi » la ministre fédérale de l’emploi proposait à nouveau le plan de chasse aux chômeurs tel qu’adopté par le Conseil des ministres du 23 mai 2008. (...)

Le contenu des sanctions avait été redéfini puisqu’il était question que les allocataires d’attente puissent encore toucher 50% de leurs allocations de chômage en cas d’évaluation négative au premier entretien à l’ONEM.

Actuellement, en cas d’évaluation négative à l’ONEM du premier contrat, les mêmes allocataires d’attente sont suspendus de la totalité de leurs revenus pendant 4 mois qu’ils soient isolés, chefs de ménage ou cohabitant.

En cas d’évaluation négative du premier contrat à l’ONEM, il avait été aussi question que les chômeurs qui touchent des allocations sur la base d’un travail subiraient comme actuellement une réduction des revenus pour les isolés et les chefs de ménage pendant quatre mois. Pour les cohabitants, il était proposé une réduction de 50% de leurs allocations pendant 4 mois alors qu’actuellement ils perdent complètement cette allocation pendant 4 mois. Selon certaines infos, on maintiendrait peut-être les mêmes sanctions qu’actuellement.

En attendant plus de clarté au niveau des sanctions, remarquons simplement que le gouvernement applique depuis déjà 4 ans la dégressivité des allocations de chômage jusqu’à la possibilité d’une exclusion totale. Le dispositif appliqué depuis 2004 aura limité carrément dans le temps le droit aux allocations pour un certain nombre de chômeurs. Si on en restait au système appliqué actuellement, il est à noter que les cohabitants, (principalement des femmes) sont lourdement touchés puisqu’ils perdent la totalité de leurs revenus pendant la période de suspension. Les chefs de ménage et les isolés en allocations d’attente continueraient eux aussi à être privés de tout revenu pendant 4 mois.

Généralisation de la contractualisation du droit aux allocations de chômage

Alors que la contractualisation n’est pas automatique dans la procédure actuelle, elle le deviendra dans la nouvelle procédure puisque le chômeur devra signer un contrat avec le FOREM dès son troisième, sixième mois de stage d’attente ou neuvième mois de chômage.

Dans la procédure actuelle, les accords de coopération du 30 avril 2004, prévoyaient un accompagnement du FOREM avant que le chômeur puisse être contrôlé par l’ONEM. Dans les faits, ces accords n’ont pas été respectés car beaucoup de chômeurs ont dû subir le contrôle du facilitateur de l’ONEM sans même avoir eu la possibilité d’un seul entretien avec un conseiller en accompagnement professionnel du FOREM.

Dès lors, les contrats établis par l’ONEM ont précédé toute action du FOREM, ce qui n’est pas normal vu que la compétence d’insertion socioprofessionnelle et d’orientation professionnelle est du ressort exclusif du service public régional de l’emploi. Petit à petit, on a donc assisté à un renversement des compétences qui a abouti au fait que des chômeurs ont dû s’activer autour d’actions qui n’étaient pas adaptées à eux.

Si l’on peut comprendre le fait de réaffirmer la place prépondérante que doit avoir le service public régional de l’emploi en matière d’insertion socioprofessionnelle, on ne peut par contre que s’opposer au fait de la généralisation de la contractualisation du droit aux allocations de chômage.

En effet, s’il est sûr qu’un certain nombre de chômeurs ont besoin d’être accompagnés dans leurs démarches pour trouver un emploi ou une formation et s’il est évident que le service public régional offre des outils qui peuvent être utiles à tous (modules CV et lettre de motivation, accès gratuit à Internet, rencontres avec des conseillers, formations professionnelles,…) on comprend moins bien que la solidarité interpersonnelle soit liée à une généralisation de la contractualisation et qu’elle doive à ce point se mériter dans un contexte où les chômeurs sont victimes d’un manque d’emplois criant (en Wallonie, il y a une offre d’emploi pour 32 demandeurs) mais aussi où des travailleurs deviennent chômeurs à cause de délocalisations et restructurations d’entreprises qui ont comme seul objectif d’augmenter le taux de profit des actionnaires.

De plus, cette contractualisation ne s’arrêterait jamais puisque même en cas d’évaluation positive à l’ONEM, un second contrat sera établi et évalué par le facilitateur ONEM 12 mois après. Le chômeur sera tout le temps sous tension et n’aura plus aucune possibilité d’autonomie. Dans la législation chômage existe déjà l’obligation de répondre aux propositions et convocations du service public régional de l’emploi sous peine d’être sanctionné. N’est ce pas suffisant ?

Augmentation probable des sanctions et du cumul des sanctions

Depuis les années 2003, 2004, le service public régional de l’emploi a mis en place ce que l’on appelle la transmission systématique d’informations vers l’ONEM. Les chômeurs qui ne se présentent pas aux convocations du service public régional de l’emploi ou qui ne répondent pas aux offres d’emploi que ce service envoie à leurs domiciles sont dénoncés à l’ONEM et sont susceptibles de perdre leurs allocations pendant un certain nombre de semaines ou de mois. En Wallonie, ce système a fait exploser le nombre de sanctions. Cette transmission est tellement prégnante, que même les numéros de téléphone et les adresses MAIL sont, dans un certain nombre de cas, transmis à l’ONEM sans l’accord formel du chômeur.

Tout cela est consécutif à des décisions politiques du gouvernement wallon qui a voulu donner ainsi une image moins laxiste de notre région sans doute pour rassurer les entrepreneurs qu’il veut attirer dans le cadre du plan Marshall. La pression libérale, qu’elle vienne du nord ou du sud du pays a donc porté ses fruits et a largement influencé les programmes de tous les partis, y compris celui du Parti Socialiste et du CDH.

Cette transmission de données fera sans doute des ravages en termes de sanctions dès la première phase de la nouvelle procédure proposée par le gouvernement fédéral. En effet, tous ceux qui ne se présenteront pas au service public régional de l’emploi pour établir le plan d’action et le contrat vont déjà se trouver en litige avec l’ONEM. Il est à craindre que des chômeurs cumulent les sanctions : pour non présentation aux convocations du service public régional de l’emploi, pour non réponse aux offres d’emploi et aussi pour le fait de ne pas avoir respecté le contrat lorsque la réalisation de celui-ci sera évaluée par le facilitateur de l’ONEM. (...)

L’évaluation à l’ONEM : un contrôle au sens strict du terme

Dans la nouvelle procédure, quand le chômeur se présentera à l’ONEM, ce sera sur la base d’un contrat. Dès lors, le facilitateur va devenir un contrôleur au sens strict du terme. Les contacts possibles entre les conseillers du FOREM et les facilitateurs ainsi que le rapport détaillé du conseiller en accompagnement professionnel ne constituent en rien une garantie : nous savons bien qu’un certain nombre de conseillers fonctionnent sur la base d’à priori vis à vis des chômeurs. On peut donc estimer raisonnablement que des facilitateurs et des conseillers tomberont d’accord sur le fait de casser des chômeurs. Dans la procédure actuelle, à part le fait que les contrats ONEM prévoient un entretien obligatoire au service public régional de l’emploi, le rôle de ce dernier était plutôt de soutenir le chômeur et de l’aider à réaliser ses obligations.

Cependant, comme déjà mentionné plus haut, de par la transmission systématique d’information vers l’ONEM, le rôle répressif du service public régional de l’emploi s’est accentué depuis ces 4 dernières années. La nouvelle procédure accentue encore un peu plus cet aspect répressif puisque les plans d’actions vont être formalisés dans des contrats. Le chômeur n’aura d’autre solution que d’exécuter les actions et le conseiller qui devra remettre un rapport avant le passage à l’ONEM ne pourra que constater ce qui a été réalisé ou pas. Quant aux facilitateurs « les plus sociaux », il est probable « qu’ils ne tiendront pas le coup dans un système pareil ».

Le refus de la contractualisation du droit aux allocations de chômage se trouve aussi renforcé de par le fait que le contrat sera évalué par une personne différente de celle qui l’aura établi avec le chômeur. Cela va nécessairement amener des confusions et des incompréhensions. De plus, alors que l’insertion socioprofessionnelle est en principe de la compétence exclusive du service public régional de l’emploi, les plans d’actions élaborés par les conseillers en accompagnement professionnel seront soumis au contrôle de l’ONEM.

Des organisations syndicales encore un peu plus affaiblies

Les accompagnateurs syndicaux, dans la procédure actuelle, ont, malgré un droit de parole limité au premier entretien, la possibilité d’intervenir dans toutes les étapes. Ils ne sont pas présents lors des entretiens que les chômeurs ont avec des conseillers du service public régional de l’emploi, mais ceux-ci n’avaient pas jusqu’à présent un caractère décisif. En tout cas, ils n’étaient pas déterminants sur les décisions prises par les facilitateurs de l’ONEM.

Dans la nouvelle procédure, nous supposons que les organisations syndicales interviendront dans le cadre des entretiens ONEM. Mais, est ce qu’elles auront tous les éléments pour le faire ? Pour l’instant, les accompagnateurs syndicaux reçoivent les PV des auditions ainsi que les contrats. Quand un affilié se présente au syndicat pour préparer un second ou troisième entretien, s’il a oublié son contrat, l’accompagnateur syndical peut le retrouver afin de préparer au mieux le passage à l’ONEM sur des bases fiables. Pour le futur, l’élaboration des contrats se fera au service public régional de l’emploi et aucune communication formelle n’est prévue à ce sujet entre celui-ci et les organisations syndicales tandis que ces mêmes contrats seront transmis à l’ONEM. Dès lors, les accompagnateurs syndicaux seront handicapés dans leurs fonctions d’accompagnement et de défense des affiliés.

En cas d’évaluation positive ou négative à l’ONEM, le prochain contrat sera formalisé au FOREM. Les organisations syndicales n’auront donc plus aucune prise sur la négociation de ces contrats alors qu’actuellement, leurs représentants peuvent influencer le contenu de ceux-ci.

Dans le projet présenté par Joëlle Milquet au conseil des ministres du 23 mai 2008, la nouvelle procédure prévoyait que la présence des syndicats au premier entretien de l’ONEM aurait pris la forme d’un simple accompagnement.

En clair, cela voulait dire que le droit de parole des accompagnateurs syndicaux aurait été limité au premier entretien à l’ONEM comme actuellement alors que celui-ci peut déjà aboutir à une sanction de 4 mois. La défense des chômeurs n’aurait pu réellement s’exercer que dans le cadre du second entretien à l’ONEM, c'est-à-dire quand une exclusion définitive aurait été en jeu. Selon les dernières informations, il semblerait que le droit à la défense pourrait s’exercer pleinement lors de la première évaluation menée par les facilitateurs. Restons malgré tout prudents car le fait qu’on ait avancé la proposition d’enlever ce droit à la défense au premier entretien à l’ONEM démontre que la place des organisations syndicales dans cette procédure d’activation est loin d’être gagnée d’avance.

Beaucoup de jeunes chômeurs seront convoqués au FOREM pour l’élaboration des contrats avant leur inscription dans un organisme de paiement et donc avant qu’ils s’affilient à un syndicat. Ils seront donc inclus dans ce processus d’activation sans possibilité d’être défendus ou accompagnés syndicalement puisque les contrats FOREM seront conclus après 3 ou 6 mois seulement de stage d’attente.

Une répression accrue de l’absentéisme

Dans les « propositions pour une politique d’accompagnement des demandeurs d’emploi personnalisée et efficace » présentées par Joëlle Milquet au conseil des ministres du 23 mai 2008, on peut lire ceci : « les chômeurs peuvent demander une fois le report de l’entretien. S’ils ne viennent pas aux entretiens, ils sont convoqués une deuxième fois par lettre recommandée » et nous ajoutons, sans conséquence sur leurs allocations de chômage.

« Un nombre très élevé de chômeurs demandent le report de l’entretien ou ne se présentent pas. Il faut en moyenne convoquer 10 à 15 chômeurs par jour pour pouvoir mener 5 entretiens »

Le gouvernement propose donc de réexaminer la problématique de l’absentéisme aux entretiens. Les pistes évoquées sont les suivantes : « d’accorder le report de l’entretien uniquement si l’absence du chômeur est justifiée par un motif valable »... « de suspendre le paiement des allocations dès la première absence injustifiée à une convocation »

Ce que le gouvernement oublie de dire c’est aussi que beaucoup de chômeurs sont convoqués à tort. En effet, il arrive fréquemment que des personnes qui travaillent ou qui sont en formation avec une dispense soient malgré tout convoquées. Dès lors, ces personnes font les démarches nécessaires pour ne pas se présenter à l’entretien puisque légalement elles ne sont pas convocables.

Parfois aussi, il y a des problèmes de réception du courrier et des chômeurs ne reçoivent effectivement pas leur convocation. C’est notamment le cas pour tous ces chômeurs qui habitent des garnis. Dans ce genre d’habitation, il est fréquent que les courriers se perdent ou n’arrivent pas au bon destinataire.

N’oublions pas non plus toutes celles et tous ceux qui vivent de graves difficultés sociales et qui ne sont plus à même de répondre à toutes leurs obligations au moins pendant une certaine période ainsi que tous les chômeurs qui ont des problèmes en lecture et en écriture, voir même qui ne savent pas du tout ni lire, ni écrire. Le fait de rétrécir les possibilités de se « rattraper » par rapport à une absence va donc de nouveau frapper les plus vénérables. Suspendre les allocations de chômage dès cette soi disant première absence injustifiée ne fera qu’aggraver les problèmes de ceux qui en ont déjà beaucoup à surmonter.

Travailleurs à temps partiel avec maintien des droits et allocations de garantie de revenus  (AGR)

Actuellement, les personnes qui travaillent à temps partiel avec maintien des droits et AGR ne sont pas convocables lors du premier entretien à l’ONEM. Par contre, ces mêmes travailleurs doivent se présenter pour justifier de la réalisation de leurs contrats au second ou troisième entretien si elles ont trouvé un tel emploi entre le premier et le second entretien et entre le deuxième ou le troisième entretien.

Depuis un certain temps déjà, les organisations syndicales demandent que ces travailleurs ne soient plus convoqués, quel que soit l’entretien auquel ils doivent se présenter. En effet, les chômeurs ne sont pas responsables de la qualité des offres émises sur le marché de l’emploi par les employeurs.

Si l’Etat souhaite que le plus grand nombre possible de personnes ne dépendent plus du tout des allocations de chômage, il faut avant tout créer des emplois de qualité et en suffisance à temps plein. Dans un marché de l’emploi qui s’est fortement précarisé, il n’est pas juste de faire pression uniquement sur les chômeurs en dédouanant les pouvoirs publics et les employeurs privés de leurs responsabilités quant à la qualité des offres de travail proposées.

Signalons d’ailleurs que cette pression a abouti au fait que des gens qui travaillaient au moment où ils se sont présentés à l’ONEM ont été sanctionnés. Les syndicats ont dû intervenir pour demander la révision de décisions qui avaient été prises dans ce sens. Incompréhensible, même du point de vue de l’activation car c’est justement au moment où un certain nombre de chômeurs mettent un pied dans le milieu du travail qu’on les sanctionne.

Il semblerait que la nouvelle procédure tienne compte des remarques qui ont été faites mais seulement de façon temporaire. Il est proposé que tous les travailleurs à temps partiels avec maintien des droits et AGR « soient traités sur un pied d’égalité, peu importe qu’ils aient acquis ce statut avant ou pendant la procédure d’activation »

« Dans l’attente de l’aboutissement des discussions sur le statut des travailleurs à temps partiel, actuellement en cours au Conseil National du Travail, les travailleurs à temps partiel sont retirés du groupe cible... » « A défaut d’accord sur le statut des travailleurs à temps partiel, la distinction qui est faite actuellement sera de nouveau d’application »

A notre sens, les travailleurs à temps partiel avec AGR ne peuvent être soumis ni au contrôle de disponibilité de l’ONEM, ni à une obligation de devoir répondre à des propositions et à des convocations du FOREM. Il faut revendiquer que ces travailleurs ne soient plus convoqués dès maintenant.

Les 50 ans et plus seront-ils soumis au prochain dispositif d’activation des chômeurs ?

Pour l’instant, il n’y a pas d’accord sur cette question entre les partenaires sociaux. La FEB exerce une forte pression pour que les 50 ans et plus soient soumis au nouveau dispositif d’activation alors que plein de mesures ont déjà été prises dans ce sens dans le cadre du Pacte des générations. Il serait faux en effet de dire que les 50 ans et plus sont insuffisamment activés quand on voit l’arsenal des mesures déjà d’application : recul de l’âge légal de la pré pension, outplacement, pré pensionnés qui demeurent demandeurs d’emploi actifs après restructuration ou délocalisation… Joëlle Milquet reconnaît elle-même que ces mesures « commencent à avoir des effets » De plus, signalons aussi que les entretiens menés par les facilitateurs de l’ONEM peuvent concerner des chômeurs âgés de 50 ans et plus si ceux-ci reçoivent la lettre d’avertissement de l’ONEM (lettre prévenant les chômeurs qu’ils seront contrôlés quelques mois plus tard sur leur recherche emploi) avant qu’ils aient atteint l’âge de 49 ans.

IDEA Consul qui a réalisé l’évaluation du Plan d’accompagnement des chômeurs ne recommande pas la généralisation de l’activation pour les 50 ans et plus tenant compte des réalités suivantes : ces travailleurs âgés se sentent abandonnés tellement ils sont refoulés par les entreprises et dès lors, s’il y a activation supplémentaire, il faut qu’elle s’accompagne d’embauches réelles pour cette catégorie de la population. Ce qui est loin d’être sûr. En cas d’activation supplémentaire, les 50 ans et plus risquent d’être obligés de chercher dans le vide et de se décourager complètement.

Conclusions

Le plan de contrôle de la disponibilité des chômeurs décidé en 2004 avait largement renforcé le caractère répressif d’un dispositif légal déjà fortement défavorable aux demandeurs d’emploi. On peut estimer que l’ONEM a suffisamment de moyens de contrôle sur les chômeurs de par la législation générale sur le chômage existante avant l’application de ce plan.

Dès lors, nous ne voyons pas l’utilité des entretiens qui sont menés par les facilitateurs à l’ONEM. L’insertion socioprofessionnelle est de la compétence du FOREM et nous ne comprenons pas les raisons pour lesquelles les chômeurs « suivis » par le FOREM seraient évalués par l’ONEM. Cela n’a pas de sens à part le fait évidemment d’exclure des chômeurs du droit aux allocations, ou aussi de préparer la régionalisation de l’ONEM avec à terme une fusion ONEM – FOREM.

Ce contre quoi nous sommes, puisque nous défendons le maintien d’une sécurité sociale fédérale. Il nous semble important également de demander que le FOREM retrouve de la liberté dans ce qu’il transmet ou ne transmet pas à l’ONEM. La transmission systématique d’infos du FOREM vers l’ONEM produit des injustices et elle est aussi à mettre en cause.

A notre sens, cette nouvelle mouture du Plan d’accompagnement, tout comme l’actuel contrôle sur la disponibilité, n’est pas acceptable. D’une part, dans un contexte où c’est l’emploi qui est indisponible et pas les chômeurs, la contractualisation du droit aux allocations de chômage est à rejeter.

D’autre part, à l’heure où tout le monde s’émeut de la baisse du pouvoir d’achat, il est quand même choquant de constater que ce sont justement ceux qui ont le moins de revenus que l’on malmène le plus. Le rejet des plans d’activation des chômeurs, qui produisent tant d’exclusions, devrait d’ailleurs faire partie intégrante de la lutte pour la défense du pouvoir d’achat.

Au lieu de traquer les chômeurs, il serait bon de traquer la fraude fiscale organisée par les détenteurs de capitaux et de créer un impôt sur les grosses fortunes. Deux manières de répartir plus équitablement les richesses afin de créer des emplois stables et à temps plein en suffisance autour d’activités qui rencontrent les besoins de l’ensemble de la collectivité.

Freddy Bouchez

Coordinateur de la Cellule d’accompagnement FGTB/Centre

Brochure diffusée par la FGTB/Centre et l’ASBL CEPRé. Pour obtenir la brochure complète et pour toute info: 064/236119

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