Accord interprofessionnel : de la rue à la table des négociations ?!
Par Jef Van der Elst le Mercredi, 06 Mars 2013 PDF Imprimer Envoyer

Après la manifestation réussie en front commun syndcial – au moins 40.000 manifestants à Bruxelles le 21 février- les différentes instances de la FGTB  se sont concertées sur la stratégie à suivre, les 25 et 26 février.

La FGTB retourne à la négociation avec un plan d’action

Dans la matinée du mardi est donc sorti le communiqué de presse suivant: « La FGTB sera présente à la concertation avec le gouvernement, le mercredi 27 février. Nous ne jouerons pas le jeu de la chaise vide, mais participerons effectivement aux prochaines négociations. Pourtant nous n’avons pas reçu toutes les réponses et les clarifications nécessaires aux questions que nous avions posées. La FGTB reste notamment très inquiète quant aux plans futurs du gouvernement en ce qui concerne notre système automatique d’indexation des salaires. Par ailleurs, les travailleurs continuent de s’opposer à toute forme de blocage des salaires et revendiquent de pouvoir mener des négociations salariales sur le plan sectoriel, certainement dans les secteurs en bonne santé . Pour ces raisons, même si elle prend place à la table des négociations, la FGTB proposera dans le courant du mois de mars un plan d’action à court, moyen et long terme. En cas de besoin, ce plan sera activé (…)»

Par ailleurs, la FGTB annonce qu’elle manifestera le 14 mars à l’occasion du sommet européen, dans le cadre de l’appel lance par la Confédération Européenne des Syndicats.

Il est clair que ces prises de position ont donné lieu à des débats internes, mais dans aucune centrale il n’y a eu une majorité contre le fait de continuer à négocier.

Accord sur les allocations, les pensions et le salaire minimum

Mercredi vers midi, le premier ministre Elio Di Rupo a annoncé qu’il n’y avait pas d’accord sur le blocage des salaires mais qu’il y avait par contre une série d’accords partiels  sur la hausse de certaines allocations et l’augmentation du salaire minimum par la voie fiscale. De plus, sous prétexte d'aide à l'emploi, les cotisations patronales à la sécurité sociale seront une nouvelle fois réduites - à 450 Euros par trimestre - pour tout travailleur du secteur marchand. Le secteur non marchand  est exclu de cette mesure parce que celle-ci est conçue en premier lieu comme un moyen de protéger la compétitivité des entreprises. Pourtant, cette mesure entraînerait certainement des créations d’emploi dans le non-marchand. Mais le gouvernement ne s'arrête pas à cette contradiction.

De plus, un certain nombre d’accords existants seront prolongés de deux ans : la prépension dans certains secteurs lourds et la prime à l’innovation.

Flexécurité

Un autre accord à signaler porte sur la modernisation » du droit du travail.  Il cadre dans le programme de Lisbonne de l'UE pour flexibiliser davantage le marché du travail et éliminer tous les obstacles sur la voie de la compétitivité des entreprises. Les détails ne sont pas encore pleinement connus, mais la stratégie est décrite dans le « livre vert » que la Belgique a écrit en 2007. Elle comporte notamment l'annualisation du temps de travail et l'augmentation des heures supplémentaires autorisées. C’est tout de suite après la conclusion de cet accord que la FGTB avait quitté les  négociations en janvier...

Statut des ouvriers et des employés

La Cour constitutionnelle  a condamné la Belgique à deux reprises pour un certain nombre de discriminations dans le statut ouvrier: une première fois en juillet 1993 et une seconde fois en juillet 2011. Les différences dans les indemnités de préavis entre ouvriers et employés et dans le paiement en cas de maladie sont contraires au principe d'égalité de la constitution, selon la Cour. Cette discrimination doit être éliminée pour le 8 juillet 2013.

A ce sujet sera constitué un groupe de travail composé de 15 personnes: le premier ministre, tous les vice-premiers et Monica De Coninck, ministre du travail, ainsi que trois représentants des syndicats, trois des organisations patronales et le président du groupe des 10.

Norme salariale

Parce qu'aucun accord ne pouvait être trouvé entre syndicats et fédérations patronales, le gouvernement, comme il y a deux ans, imposera un accord par arrêté royal. La révision de la loi de 1996, pour fixer la norme salariale pour les années suivant 2014, ne sera probablement pas réalisée: ce sera une tâche du gouvernement suivant...

Le grand écart entre mobilisation et concertation

Cela fait un certain temps que la FGTB fait le grand écart entre concertation et mobilisation.

On ne peut évidemment pas se passer de négocier pour atteindre certains objectifs. Mais, pour cela, il faut construire des rapports de forces. Ce n'est possible que par un plan d'information et de mobilisation conséquent. Et c'est ici que le bât blesse. Après la manifestation réussie du 21 février il faut de nouveaux mots d'ordre pour renforcer la lutte. C'est le seul moyen pour empêcher que la norme salariale, qui veut bloquer tous les salaires pendant deux ans en dépit de toutes les protestations et oppositions, ne devienne un fait.

Le moindre mal

Une opposition conséquente à la norme salariale mènera à une confrontation avec le gouvernement. Il est clair que celui-ci est très déterminé non seulement à imposer ces mesures, mais en plus à prendre de nouvelles mesures d'austérité lors du prochain contrôle budgétaire. Beaucoup de responsables syndicaux veulent éviter cette confrontation. Or, ce gouvernement n'est pas le gouvernement du moindre mal, mais un gouvernement qui veut à ,tout prix imposer la politique européenne d'austérité à la Belgique.


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