Pas cette Europe-là! Pas de cette manière! Pas en notre nom!
Par Collectif le Vendredi, 11 Avril 2008 PDF Imprimer Envoyer
Bonjour, nous vous invitons à faire partager cette carte blanche, cosignée par UAG, parue dans Le Soir du 1er avril (et ce n’est pas un poisson) pour contester la façon non démocratique dont sont imposés en Europe l’entrée des fondements néolibéraux dans nos législations à travers les Traités de l’Union européenne.

Un collectif de signataires (*)

Pas cette Europe-là ! Pas de cette manière ! Pas en notre nom !

En décembre 2007, les chefs d’État et de gouvernement des 27 pays de l’Union européenne ratifiaient à Lisbonne un « nouveau » traité européen. La consigne a alors été donnée de le faire ratifier dans chacun des pays de l’Union, au pas de charge, sans réelle information, sans consultation de la population, sans référendums. Même en France et aux Pays-Bas, où, en 2005, la population s’était prononcée contre le traité constitutionnel européen (TCE) par référendum.

Pourtant, le « nouveau » traité dit « modificatif » reprend quasi intégralement le texte du TCE. Valéry Giscard D’Estaing, le « père du TCE », l’a confirmé : « En termes de contenu, les propositions demeurent largement inchangées, elles sont justes présentées de façon différente. »

Sans bruit, le Sénat belge a déjà ratifié ce traité et les six autres parlements belges (fédéral, communautaire, régional) doivent également se prononcer dans les semaines qui viennent. Nous lançons un appel urgent aux organisations sociales, syndicales, aux partis et aux parlementaires qui, dans leurs déclarations et leurs programmes, souscrivent aux valeurs d’égalité, de solidarité, de justice fiscale et sociale et d’écologie afin qu’ils se mobilisent contre ce traité.

Dans ce « nouveau » traité, la « concurrence libre et non faussée » reste bel et bien la pierre angulaire de la construction européenne, à laquelle tout doit être subordonné. Les services publics restent des « services d’intérêt économique général », soumis aux règles de la concurrence, condamnés à la privatisation de fait, au niveau tant fédéral que régional et communal. Or, la libéralisation, totale ou partielle, d’un service public entraîne, nous le voyons tous les jours, une détérioration du service, une augmentation des prix et une dégradation des conditions de travail et de l’impact sur l’environnement.

Dans ce traité, comme dans les précédents, le domaine social est en option ou en régression. Rien de sérieux n’est proposé pour rencontrer les défis écologiques. Par contre, la concurrence est une obligation ! La Charte des droits fondamentaux de l’UE, tellement mise en exergue par d’aucuns, représente une saisissante régression par rapport à la Déclaration universelle des droits de l’homme et à la Constitution belge. On n’y affirme plus le droit au travail, mais le droit de travailler ; pas de droit à la Sécurité sociale, mais le droit d’accès aux services sociaux. Pas question non plus de droit de grève, de solidarité de dimension européenne, ni de reconnaissance du droit à l’avortement et à la contraception. Le droit à un environnement sain n’est pas reconnu.

Le seul domaine où les dépenses publiques sont encouragées, c’est l’armée, avec la stimulation d’une Agence européenne de défense, dans le cadre de l’OTAN et sous l’égide des États-Unis.

Ce traité réaffirme l’option d’une Europe forteresse, ouvrant la porte au harcèlement administratif et policier pour tous ceux et celles qui ne possèdent pas la nationalité d’un État membre.

Et pour couronner le tout, le rôle et le pouvoir du Parlement européen restent limités : le monopole de l’initiative législative reste dans les mains de la Commission européenne, soumise aux pressions des lobbies industriels et financiers.

Certains nous diront : « Bah ! Ce n’est qu’un traité. Cela ne nous empêchera pas de nous battre, chaque fois qu’il le faudra, pour la préservation de nos acquis sociaux ! »

Mais l’avis rendu au gouvernement belge par le Conseil d’État sur le traité européen confirme l’urgence de notre appel : « Il ne faut pas oublier, précise le Conseil d’État, que les institutions européennes prennent parfois des règlements et directives qui sont en contradiction avec la loi belge. Étant donné la suprématie du droit européen, en ce compris le droit européen dérivé, la Belgique ne peut pas se prévaloir de la Constitution pour s’opposer à de telles dispositions européennes. »

Nous sommes profondément Européens et démocrates. Nous refusons que la construction européenne se développe sans les citoyens, contre leurs conquêtes sociales et a contrario des nécessités écologiques. Nous refusons d’enfermer notre avenir dans un traité néolibéral dont l’adoption constitue un obstacle majeur et supplémentaire à la construction de l’Europe que nous voulons. Dire non et voter contre le traité de Lisbonne n’est qu’un premier pas. Mais un pas nécessaire qui va dans la bonne direction : celle de la construction d’une autre Europe, démocratique, sociale, pacifique, écologique et solidaire.

Nous appelons nos organisations à se prononcer clairement contre ce traité. Nous appelons les partis et les parlementaires – à la Chambre, aux niveaux régional et communautaire – à affirmer leur opposition à ce traité, condamnable dans son élaboration, dans son contenu et dans le mode de ratification choisi et imposé. Ce serait là mettre en adéquation choix politiques et déclarations en faveur d’une Europe démocratique, sociale et écologique.

Enfin, quelle que soit la position des uns et des autres sur ce traité, le moins que nous puissions attendre des parlements est l’organisation de débats contradictoires ouverts aux mouvements sociaux. Raison pour laquelle nous demandons aux parlements régionaux et communautaires qu’ils prennent une telle initiative, à l’instar de ce qui a été fait au parlement de la Région wallonne en 2005, lors du débat sur le traité constitutionnel européen.

(*) France Arets (CRACPE), Bruno Baudson (permanent CNE), Didier Brissa (A Contre Courant), Olivier Cailloux (Attac Wallonie-BXL), Georges Debunne (ancien président de la FGTB), Céline Delforge (députée bruxelloise Écolo), Jean-Marie Delmagne (avocat), Paul-Emile Dupret (juriste, Gauche unie européenne/NGL), Pascal Durand (professeur ULg), Pierre Eyben (Parti communiste), Christina Gay (porte-parole fédérale d’Une Autre Gauche), Michèle Gilkinet (présidente du Grappe), Corinne Gobin (directrice du Graid-ULB), Denis Horman (Ligue communiste révolutionnaire), François Houtart (professeur émérite UCL), Francis Huart (comité bruxellois pour une consultation populaire), Paul Lannoye (député honoraire européen), Paul Lootens (secrétaire. fédéral Centrale générale/FGTB), Anne Mouchet (groupe Climat et Justice sociale), Eric Némes (syndicaliste belge et européen), Christine Pagnoulle (chargée de cours ULg), Laurent Pirnay, Madeleine Ploumhans (collectif de résistance au traité de Lisbonne), Jef Sleeckx (ancien parlementaire socialiste), Christophe Vandamme (« Notre mot à dire »), José Vermandere (permanent MOC Charleroi/Thuin), Renaud Vivien (Cadtm)

http://notremotadire.be/ http://cr-tl.be/liens.htm

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