BRÉSIL: Lula confortablement réélu
Par João Machado le Vendredi, 10 Novembre 2006 PDF Imprimer Envoyer

Dimanche 29 octobre, Lula (Parti des travailleurs) a été réélu président du Brésil, avec 58,3 millions de voix (60,8 %) contre 37,5 millions (39,2 %) pour son adversaire de droite, Geraldo Alckmin.

Le résultat du deuxième tour de l’élection brésilienne qui a donné, dimanche 29 octobre, une large victoire au président sortant, candidat du Parti des travailleurs (PT), Luiz Inacio Lula, était prévisible. Mais un aspect de cette élection l’était beaucoup moins : son adversaire de droite, Geraldo Alckmin, membre du Parti social-démocrate brésilien (PSDB), a reculé par rapport au premier tour, perdant presque 2,5 millions de voix !

Au soir du premier tour, la situation était très différente : Lula, arrivant en tête, était en baisse dans les sondages. Le président sortant a donc contre-attaqué en accusant Alckmin d’être favorable à la privatisation des entreprises publiques, notamment en ce qui concerne la principale entreprise brésilienne, Petrobrás, et la Banque du Brésil. Jusqu’alors, le président brésilien, à l’origine de la loi permettant le partenariat public-privé - véritable privatisation masquée -, n’avait absolument pas abordé le sujet. Avant le premier tour, il avait insisté sur ses liens avec les plus pauvres, prenant pour preuve le programme « bourse famille », mais il n’avait pas établi de véritables différences politiques avec Alckmin.

Cette nouvelle orientation a porté ses fruits, car les privatisations sont impopulaires. La Petrobrás, pourtant partiellement privatisée par le gouvernement Cardoso et fonctionnant comme une entreprise capitaliste, est considérée par le peuple comme faisant partie du patrimoine national. Alckmin s’est donc retrouvé sur la défensive. De plus, une partie de la gauche, qui ne s’était pas intéressée au premier tour, s’est mobilisée contre Alckmin. Lula l’a attirée en tenant un discours plus ancré à gauche. Dans un débat avec son adversaire, le président brésilien a ainsi accusé Alckmin de vouloir faire une politique étrangère semblable à celle de Bush, ce qui était crédible, Alckmin ayant critiqué les aspects progressistes de sa politique. Enfin, il a bénéficié du fait qu’il n’y ait pas eu de nouvelles révélations dans les scandales atteignant son entourage.

Voilà ce qui explique le succès de Lula au second tour. Le président brésilien a gagné la plus grande partie des voix de la candidate du Front de gauche et membre du Parti du socialisme et de la liberté (Psol), Heloísa Helena, ainsi que celles recueillies par Cristovam Buarque, du Parti démocratique travailliste (PDT) et même une partie des suffrages de Alckmin. Cela confirme le fait qu’il y a, au Brésil, un espace pour une ligne plus à gauche, ce qu’avaient déjà démontré, au premier tour, les voix de Heloísa Helena et, dans une certaine mesure, celles de Cristovam Buarque.

Ce dimanche 29 octobre, se tenaient également le deuxième tour des élections aux postes de gouverneurs d’État. Trois résultats méritent l’attention. En premier lieu, celui du Rio Grande do Sul, où le candidat du PT, Olívio Dutra, a perdu. Ce résultat est significatif, car le poids du PT dans cet État, qui a accueilli à trois reprises le Forum social mondial, à Porto Alegre, était très important. Lula lui-même n’est pas arrivé en tête dans cet État. Ensuite, dans l’État du Maranhão, la candidate soutenue par Lula, Roseana Sarney, se présentant contre le candidat soutenu par le PT local, Jackson Lago, a perdu. Enfin, dans le Pará, la candidate du PT, Ana Julia, qui était arrivée deuxième au premier tour, a gagné. Bien que liée à l’un des courants de la gauche du PT (DS-PT), Ana Julia a mené la même campagne que le reste du son parti. Sa victoire est en partie due au soutien d’un des symboles de la corruption, Jader Barbalho, membre du Parti du mouvement démocratique brésilien (PMDB), et ex-gouverneur du Pará. Conséquence : Ana Julia gouvernera avec le PMDB - comme Lula au niveau national -, mais elle sera remplacée au Sénat par son suppléant, qui milite au Psol.

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