Motion sur les élections
Par LCR le Jeudi, 20 Mars 2003 PDF Imprimer Envoyer

Motion sur les élections législatives de juin 2003 adoptée par le Comité central du POS (ex-LCR), le 09 mars 2003

1. Le POS s'inscrit pleinement dans le cadre du mouvement « altermondialiste », qui constitue une nouvelle vague de résistance au néolibéralisme et à la guerre.

Le POS veut renforcer et construire ce mouvement:

* comme espace de débat sur les alternatives au néolibéralisme

* comme moyen d'organiser la résistance aux attaques du néolibéralisme (guerre, GATS, privatisations, droits sociaux, immigration, répression, ...).

2. Le POS résiste à la politique néolibérale de l'arc-en-ciel. Après quatre ans de gouvernement arc-en-ciel, les inégalités se sont renforcées dans la société. L'insécurité sociale a augmenté (contrats de travail précaires, stress, ...). Le problème du chômage n'est pas résolu. Les exclusions sociales s'intensifient.

L'orientation de l'austérité budgétaire est maintenue (normes de Maastricht). La réforme fiscale n'a pas servi à « prendre l'argent là où il se trouve », n'a pas mobilisé les moyens financiers pour une politique de redressement social. Les privatisations se poursuivent (énergie, communication et transport, privatisation latente des pensions, ...). La réforme Copernic réorganise les services publics selon les méthodes du secteur privé (« managers » bien payés, augmentation du stress et de l'insécurité au travail, ...).

Le gouvernement est un fidèle exécutant de la politique néolibérale de l'Union Européenne.

Il n'y a aucune politique visant l'égalité des droits. La régularisation des sans-papiers a servi de prétexte pour durcir la politique d'immigration et d'asile.

Cela va de pair avec un renforcement des tendances autoritaires (discours sécuritaire, réforme électorale, remplacement du débat politique par des opérations médiatiques menées par des politiciens de haut vol qui se profilent individuellement, subordination de l'administration à la majorité politique du moment sous couvert de Copernic, contournement du contrôle du parlement, ...).

Sur le plan international, le gouvernement ne s'affronte pas à l'ordre mondial néo-libéral. Sa résistance à la guerre contre l'Irak ne rompt pas avec cet ordre mondial néo-libéral. Au contraire, il conteste cette guerre parce qu'elle n'est pas un moyen adéquat (instabilité) et craint qu'elle ne soit préjudiciable au rapport de forces entre l'UE et les USA. La résistance de l'arc-en-ciel à la guerre ne prend pas la forme d'une confrontation effective avec les USA et leurs alliés, parce que la stabilité de l'ordre mondial néolibéral prime sur tout le reste.

3. Malgré sa politique néolibérale caractérisée, le gouvernement a réussi à éviter toute grande confrontation avec le mouvement social. La polarisation et la tension sociales ont diminué, en comparaison avec la situation qui prévalait avant les élections de juin 1999.

Le gouvernement a mené une politique délibérée de « divertissement » social. Bien qu'il n'y ait eu aucun changement fondamental d'orientation (les normes budgétaires ont été maintenues), la tonalité politique a changé (le discours sur l'austérité n'est plus central).La conjoncture économique relativement favorable des premières années du gouvernement ont laissé plus d'espaces à des initiatives médiatiques, qui ont renforcé l'idée que la stricte austérité n'était plus d'application (fausse augmentation des allocations sociales, la boîte vide du fonds de solidarité pour les pensions, etc.). La réforme fiscale augmente le pouvoir d'achat d'une grande partie de la population, mais la facture devra être payée sous une législature suivante (déconstruction de « l'État Providence »).

Cela va de pair avec une tonalité « moderne », qui masque la politique réelle. Cette image moderne repose aussi sur des mesures positives, mais ponctuelles et très limitées par rapport aux attentes qu'elles avaient suscitées, sur des dossiers « éthiques » (mariage des homosexuels, euthanasie, ...). En même temps, le débat politique fait la place aux gadgets médiatiques.

Pour tout cela, le gouvernement est aidé par la participation des verts, qui le couvrent sur sa gauche, et par la mise au pas des voix critiques dans le mouvement syndical.

Le gouvernement est aussi aidé par les pratiques sectaires qui continuent de proliférer dans la gauche non parlementaire, qui nuisent au mouvement social dans sa recherche de formes efficaces de résistance à cette politique néo-libérale.

Mais le mécontentement et la révolte continuent de gronder par en bas dans la société. L'insécurité sociale croissante, la concurrence et l'individualisme augmentent la pression vers une recomposition à droite en Flandres, avec différentes composantes (le Vlaams Blok qui attire les perdants de la concurrence sociale, tandis que les gagnants se reconnaissent dans le VLD...). En Wallonie et à Bruxelles, le « pôle des gauches» (PS et Ecolo) s'efforce de capitaliser le mécontentement avec un profil social, mais sans faire le bilan de l'arc-en-ciel néolibéral et dans la perspective de retourner au pouvoir dans le même type d'alliance avec la droite.

4. Le mouvement social n'a pas trouvé la voie vers une résistance globale à cette politique néo-libérale. La résistance sur des terrains partiels reste isolée (réfugiés). La conscience de la catastrophe mondiale comme conséquence du néolibéralisme a favorisé, aussi dans notre pays, le développement et l'organisation de l' » altermondialisme ». Cela a été renforcé par l'inquiétude croissante face au néolibéralisme dans le monde syndical. Mais le gouvernement a réussi à éviter toute confrontation centrale avec le mouvement social.

Cela a pour effet de retarder, au sein du mouvement social, la clarification politique et le développement d'une autonomie politique vis-à-vis du régime. La conscience renouvelée dans une autre vision du monde (« un autre monde est possible »), traduite en propositions pour une autre politique (mémorandums) ne mène pas à une confrontation politique avec le gouvernement et à des alternatives politiques. La responsabilité des verts est écrasante : ils ont occupé le terrain électoral d'une « autre politique ».

Ce n'est que dans la dernière phase qu'un certain nombre de conflits potentiels sont apparus (chômage croissant, licenciements et fermetures d'entreprises, pression sur la sécurité sociale, GATS, néolibéralisme de l'Union Européenne, guerre contre l'Irak, ...). Il est trop tard pour que tout cela débouche sur une clarification avec l'arc-en-ciel pendant cette législature. Mais il faudra plutôt utiliser ces élections, et la période de formation d'un nouveau gouvernement, pour préparer la clarification qui pourra avoir lieu pendant une prochaine législature.

5. L'AEL a été un des rares mouvements à mener une confrontation avec le néolibéralisme arc-en-ciel sur une question politique centrale. Elle a lancé un défi au racisme et à la criminalisation des mouvements sociaux. Elle a élaboré un programme de revendications qui vise un des points faibles de l'arc-en-ciel néolibéral (la politique sociale), et a lancé le débat sur la place des personnes originaires du monde arabe dans notre pays (droits égaux, identité).

En faisant alliance avec le PTB sur la liste Resist, l'AEL elle-même gâche une possibilité de devenir un facteur actif dans la recomposition d'une gauche politique. Avec sa politique sectaire, le PTB est le principal responsable du blocage dans le développement d'une alternative politique crédible à gauche, parce qu'il empêche qu'il y ait une collaboration positive entre la mobilisation du mouvement social et des pratiques non sectaires, non-manipulatrices de la gauche radicale. L'idéologie stalinienne du PTB le rend irrelevant pour les débats sur les alternatives au sein du nouveau mouvement social, qui est à la recherche y compris sur base d'un bilan critique des échecs du mouvement ouvrier au siècle dernier. Le POS ne présentera pas de candidats sur la liste Resist.

6. Le POS constate qu'il n'y aura pas de listes qui peuvent traduire en force électorale une pratique commune à gauche, en lien avec la mobilisation sociale (tout en respectant son autonomie et son pluralisme). Cependant cela peut avoir un sens de présenter des listes à ces élections, pour faire entendre une voix qui fasse un bilan de gauche du gouvernement, et participer ainsi à la nécessaire clarification politique. Le POS marque sa préférence pour des listes ou des candidats qui couplent cette initiative politique avec une construction non sectaire et non-manipulatrice de la gauche radicale, et à la volonté d'une collaboration ouverte en lien avec le mouvement social, respectant le pluralisme et l'autonomie de ce mouvement social.

Le POS appelle à voter pour toutes les listes non-sectaires qui critiquent l'alliance arc-en-ciel d'un point de vue de gauche. Dans ce sens, il est ouvert aux propositions des régionales de Liège et de Bruxelles du Parti Communiste de mettre des candidats du POS sur des listes (dont la configuration exacte reste à définir). Les sections concernées prendront les décisions définitives.

Pour le POS, les votes qui se feront sur les candidat(e)s de l'AEL sur la liste Resist seront un soutien à la lutte pour les droits sociaux, politiques et culturels des communautés et des personnes issues de l'immigration, pour le droit à leur identité propre, et comme une voix contre l'échec généralisé de la politique néolibérale de l'arc-en-ciel en ce qui concerne la politique sociale. De plus, cette liste s'inscrit clairement contre la guerre impérialiste en Irak.

Le POS appelle à ne pas voter pour les partis qui incarnent la politique néolibérale de l'arc-en-ciel ou aux partis qui la critiquent d'un point de vue de droite. Le POS se battra contre toute voix pour l'extrême droite.

7. En ce qui concerne le POS, la priorité est donnée à l'investissement de forces dans la construction du mouvement altermondialiste.À court terme, le POS se fixe les priorités suivantes:

* la mobilisation contre la guerre en Irak. Le POS résiste à cette guerre qui est une arme pour renforcer l'ordre mondial néolibéral, et pour assurer la domination de l'impérialisme US dans cet ordre mondial néo-libéral. Sur cette base, le POS plaide pour une mobilisation unitaire qui résiste inconditionnellement à cette guerre, avec ou sans résolution de l'ONU, et sans subordonner cette résistance à la diplomatie de l'impérialisme européen. Le POS lie cette mobilisation à la solidarité avec la résistance palestinienne ;

* la mobilisation contre le renforcement de l'ordre néolibéral en Europe, à travers les prochaines étapes de la construction de l'UE (convention européenne, droits sociaux, services publics, ...) ;

* la construction en Belgique et en Europe d'un « mouvement des mouvements » qui soit à la fois un espace pour mener le débat sur les alternatives, sans exclusive et dans le respect du pluralisme, et un cadre qui favorise les alliances dans la résistance aux offensives néo-libérales.

Le POS, qui est une organisation politique, continuera d'autre part de mener le débat sur le déblocage politique à gauche. Le POS est convaincu que ce déblocage ne sera possible que par le dialogue patient avec les autres forces politiques, et par la maturation du mouvement social qui lutte pour un autre monde et qui doit devenir lui-même un sujet politique.

8. Le POS favorisera après les élections des initiatives pour faire le bilan des élections, et pour continuer le débat sur la recomposition politique et électorale nécessaire à gauche.

Voir ci-dessus