France: En grève pour les retraites
Par LCR-Web le Lundi, 22 Octobre 2007 PDF Imprimer Envoyer

Le mouvement de grève du 18 octobre des syndicats français contre la réforme des retraites a connu un succès important, signe de la volonté des travailleurs d’en découdre. La grève a été massivement suivie à la SNCF et à la RATP, avec 73,5% de grévistes, soit bien plus que les 67% atteints lors du conflit historique de 1995. A EDF, l’action a été suivie par 51,9% des salariés et dans les ministères entre 8 et 20%. Dans tout le pays, 300.000 personnes ont manifesté dans les rues, dont 25.000 à Paris. Face à l’intransigeance gouvernementale, l’épreuve de force ne fait que commencer. Mais malgré la volonté de lutte exprimée par la base, les directions syndicales se sont refusées, du moins pour l’instant, à envisager la grève reconductible. (Photo : Photothèque Rouge/Babar).

Reconduire, généraliser, pour gagner

« L’heure est grave ! », dit le tract unitaire de Haute-Loire (unions départementales CGT, FO, FSU, Solidaires), qui poursuit : « Pour défendre toutes les retraites, public, privé, tous en grève », le 18 octobre. Suivent les exigences unifiantes : retour aux 37,5 ans pour tous, calcul sur les dix meilleures années dans le privé, défense des régimes spéciaux, retraite à 60 ans. De telles plateformes, ou des variantes, couvrent aujourd’hui plusieurs dizaines de départements. Le 18 octobre a donc pris la dimension d’un début de mouvement global, alors qu’il n’était, au départ, qu’une journée « professionnelle ». Parfois, ce sont presque les mêmes formules de tract qui sont reprises, d’un département à l’autre, comme si les responsables les faisaient circuler, sans consigne confédérale. Dans la CGT, cela ressemble à un moment déjà vécu : le débat sur le traité constitutionnel... Avec, cette fois, une question syndicale et politique, « grave » : comment gagner contre un pouvoir qui prétend que rien ne l’arrêtera ? Claude Guéant, le numéro 2 officieux du pouvoir, assène : « Il n’y aura pas de recul possible » (Le Monde du 14 octobre). Quant à l’agitateur Fillon, il se spécialise dans le toujours moins : moins d’État, moins de personnel, moins de service...

Quelle est la force réelle du pouvoir ? Un sondage BVA-Les Échos montrerait que la « grève par procuration », qui faisait la légitimité des luttes depuis 1995, disparaîtrait le 18 octobre (grève jugée « injustifiée » à 53 %). D’autres indicateurs (CSA) montrent que la confiance dans le chef de l’État chute de dix points. Au-delà des chiffres, le volontarisme sarkozyen reste soutenu par les catégories populaires, mais Fillon perd douze points chez les ouvriers, quand il annonce la « rigueur ». Autrement dit, le libéralisme ancienne méthode ne passe toujours pas, mais la cohérence du système sarkozyen fait encore écran. Elle ne pourra s’effriter que par une voie interprofessionnelle, solidaire, unissant privé, public, précaires, dans le pays tout entier, vers un début de cohérence alternative. La journée du 18 octobre, par sa massivité, et donc son poids politique, démontre que c’est possible, après la manifestation du 13 octobre qui, pour la première fois à grande échelle, dénonçait les conditions inhumaines de travail, mais aussi les franchises médicales, deux thèmes liés.

C’est possible, mais à quelles conditions ? Sarkozy et Fillon veulent une revanche politique contre les salariés, qui ont fait trébucher le libéralisme à plusieurs reprises. Le projet de Xavier Bertrand est limpide : c’est un décret en phase terminale, la négociation est bidon, sauf à préparer une trahison. Les confédérations syndicales ne peuvent en aucun cas empêcher quoi que ce soit sur les retraites de tous, lors du rendez-vous de 2008, si elles laissent les cheminots, les électriciens et la RATP perdre leurs acquis à la fin 2007. Le donnant donnant de François Chérèque (CFDT), le 15 mai 2003, acceptant la contre-réforme Fillon (40 annuités pour tous, baisse des pensions) contre le droit de partir plus tôt pour les carrières longues, est déjà méprisé par Fillon lui-même, qui prétend que la loi de 2003 a déjà écrit celle de 2008. Il n’y a pas de donnant donnant possible sur le dos des régimes « spéciaux ».

La CGT a rendu public un mémorandum démontant les mensonges du projet de Xavier Bertrand. Il se termine par deux propositions, dont la portée peut être unifiante : généraliser à tout le salariat la réparation de la pénibilité au travail par des bonifications de départs anticipés, en fonction des durées d’exposition aux risques, et retourner à l’indexation des pensions sur le salaire d’activité (derniers salaires dans la fonction publique, dix meilleures années dans le privé). Mais il manque seulement un « détail » : retraite complète garantie après 37,5 annuités et refus de toute décote ! L’argument - contre les 37,5 annuités - de l’entrée tardive dans la vie active ne peut être retenu (même si le constat est réel) : plus on commence à travailler tard, moins l’augmentation des annuités requises est acceptable !

C’est donc aujourd’hui que la plateforme interprofessionnelle de 2008 doit se défendre. La bataille des retraites commence maintenant, comme en 2003 la confrontation a été précédée par l’attaque des retraites EDF-GDF dès décembre 2002. C’est ce qu’ont compris toutes les intersyndicales locales, qui ont fait du 18 octobre la première journée de résistance au sarkozysme. Six fédérations syndicales cheminotes sur huit (SUD-Rail n’a pas été convié !) ont appelé à se revoir le 22 octobre « pour appeler de nouveau à la mobilisation, y compris pour engager un mouvement de grève reconductible ». Si cet appel n’est pas qu’une diversion (alors que la reconduction était fortement envisagée le 19), il doit être accompagné d’un engagement confédéral pour une mobilisation interprofessionnelle au même moment, y compris contre la casse du contrat de travail, contre la fusion ANPE-Unedic, pour les droits des chômeurs. L’heure est à reprendre l’initiative, pour mettre un coup d’arrêt à la déferlante des contre-réformes.

Dominique Mezzi (LCR France)


Il est temps de rétablir la vérité sur les régimes spéciaux

1) Le contribuable paye les avantages spécifiques des régimes spéciaux : FAUX

Il n’y a pas un centimes d’Euros donné par l’Etat, donc le contribuable, afin de payer les départs anticipés à la SNCF. Ce sont les cheminots par leur surcotisation et des pensions plus faibles qui les financent. Comment : en cotisant en moyenne 12 points de plus par rapport au privé (40% de charge social pour 28% dans le privé) et en touchant une pension proportionnellement plus petite au regard du dernier salaire touché (67% du dernier salaire à la SNCF contre 84% dans le privé). Cotiser plus, toucher moins, mais partir plus tôt à la retraite, voilà comment les cheminots financent eux-mêmes leur départ anticipé.

Le saviez-vous :

Un cheminot en cotisant 40% tout au long de sa carrière, laquelle est en moyenne de 34 ans, cotise plus d’argent pour les retraites qu’un salarié du privé cotisant à 28% pendant 40 ans, c’est mathématique !

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2) Mais alors à quoi servent les 2,6 Milliards d’Euros que l’Etat donne à la SNCF afin de financer le régime spécial.

Voilà l’ambiguïté de la chose, permettant aux esprits mal intentionnés d’expliquer que le contribuable finance les départs anticipés à la retraite des cheminots, pourtant la réalité est tout autre. En 1945, il y avait 450 milles cheminots, aujourd’hui ils ne sont plus que 160 milles, résultat en 2007, il y a 164 milles cotisants pour 300 milles pensionnés (190 milles pensions directes et 112 milles pensions de reversions). L’Etat et la direction de la SNCF ont volontairement diminué l’effectif du chemin de Fer depuis 50 ans. Disparition des gardes barrières, suppression de l’aide conducteur dans les cabines de conduites, mise en place de l’EAS( Equipement Agent Seul), des guichets automatiques, fermeture de gare etc...Résultat il y a 2 fois plus de pensionnés par rapport au nombre de cotisants. On appel cela un déficit démographique. Celui-ci est financé par l’Etat à hauteur de 2.6 milliards d’Euros. Si un jour le régime de retraite de la SNCF passe au régime général et donc avec un départ à 60 ans, ce n’est pas l’Etat qui donnera cette compensation mais la sécurité sociale, donc l’argent des salariés français.

Le saviez-vous :

Aujourd’hui les secteurs d’activités pourvoyeurs d’emplois financent les déficits démographiques des secteurs déficitaires, comme le textile, la sidérurgie par exemple secteur ayant plus de pensionnés que de cotisants. Ce vase communiquant existe déjà à la sécurité sociale, s’il est invisible aux yeux de tous, il est pourtant la base de la solidarité interprofessionnelle. Y rajouter le régime de la SNCF ne fera pas un centime d’économie, car ce qui hier était payé par l’Etat demain sera payé par la sécurité sociale.

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3) Le régime spécial des cheminots est « indigne ».

« Indigne » voilà l’adjectif utilisé par Sarkozy pour qualifier les régimes spéciaux. Il ne parle pas ici des parachutes dorés de certains patrons finançant leur retraite a coût de stock option à hauteur de plusieurs millions d’euros. Il n’évoque pas non plus par cet adjectif, les pensions des députés 6 fois plus importantes que le montant de leur cotisation. Ni de la retraite de jacques Chirac de l’ordre de 30 milles Euros net par mois. Non l’adjectif « indigne » est réservé aux régimes spéciaux. Mais quelle est donc exactement l’ampleur de ces retraites dorées ?

Le saviez-vous :

Les pensions moyennes d’un retraité cheminot est de 1600 Euros Brut en 2006 pour 1713 Euros chez un salarié du privé. 19% des cheminots avaient une retraite inférieure à 1100 Euros brut par mois. 70% des pensions de reversions (veuves essentiellement) sont inférieures à 700 Euros brut par mois. Voilà la réalité des retraites « indignes » des cheminots. La seule chose indigne la dedans, ce sont les propos d’un président de la République, toujours prêt à stigmatiser une catégorie de la population.

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4) Il est juste d’aligner les régimes spéciaux au régime général.

L’argument de l’égalité est sûrement le plus fallacieux. La justice étant évidemment, pour certain, le nivellement par le bas au lieu de l’alignement vers la haut. Aujourd’hui les écarts de salaires entre les hommes et les femmes sont en moyenne de l’ordre de 25%. Qui pourrait accepter qu’au nom de l’égalité on baisse les salaires des hommes de 25% afin de les mettre au niveau de celui des femmes : personne. Pourtant voilà ce qui est proposé sur les retraites. Il est anormal que la quatrième puissance économique mondiale ne puisse pas financer le départ à la retraite de tous avec 37.5 années de cotisation. A quoi servent alors les progrès techniques si ce n’est pour permettre au plus grand nombre d’en profiter.

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5) Le vieillissement de la population nous oblige à réformer notre système de retraite, il n’y a pas suffisamment de cotisants pour payer les retraites.

L’argument démographique parait souvent comme le plus évident, trop de retraités, pas suffisamment de cotisants, le système ne peu plus fonctionner de la sorte, CQFD. Pourtant là encore la réalité est bien plus complexe qu’il n’y parait. En 1960, la part du PIB consacrée aux retraites était de 5%, pour 12% en 2007. En 2040 si le système ne change pas cette part attendra 18% du PIB, soit une augmentation de 0.7% d’ici 2020, on est finalement assez loin de la « faillite ». S’il y a de moins en moins d’actif, ceux-ci produisent individuellement bien plus de richesse chaque année. La question n’est donc pas le nombre d’actif, mais bien la richesse produite par chaque actif. Aujourd’hui celle-ci est suffisamment importante afin de financer les pensions de retraités quand bien même ceux-ci deviendraient aussi nombreux que les actifs.

Le saviez-vous :

En 1980, il fallait 2 conducteurs pour conduire un train, le conducteur plus son aide, en 2007 il n’y a plus qu’un seul agent. Par conséquent un Agent de conduite produit autant de richesse en 2007 que 2 agents en 1980 par exemple. Des exemples de ce type se multiplient a foisons.

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6) le métier est devenu moins pénible, un départ anticipé ne se justifie plus.

Le départ à 55 ans a l’origine était pour "fidéliser" les salariés à l’entreprise. La retraite à 50 ans pour les conducteurs correspond à la pénéibilité liée au travail. A la SNCF de nombreux postes de sécurités nécessitent des formations longues et onéreuses pour la SNCF, afin de fidéliser ses salariés, elle leur proposa des avantages spécifiques comme la retraite à 55 ans. Ce type de systèmes existe déjà partout, notamment dans les grandes firmes américaines, lesquelles proposent régulièrement à leurs salariés des avantages spécifiques en termes de retraite et de prestation sociale.

Le saviez-vous :

Pour ce qui est de la pénibilité au travail, sur 160 milles cheminots, 120 milles travaillent en horaire décalé. Les WE, jours de fètes, lors des vacances scolaires à tout heure du jour et de la nuit. Si il est vrai que le progrès à permis de faire baisser la pénibilité d’un stricte point de vu physique, celle-ci n’a pas pour autant disparue, en se transformant notamment, en pénibilité phycologique. L’individualisation du salariat combiné à de nombreuses et diverses évolutions, ont considérablement augmenté le stress sur le lieu de travail. Agent commerciaux insultés, solitude dans certain poste, notamment pour les agents de conduites. Toutes ses évolutions rendent très difficile le travail jusqu’à 60 ans. Est-il raisonnable qu’un travailleur de 60 ans se lève à 3 h du matin pour conduire un train 7 heures d’affilés. Au même âge, comment un agent d’accueil pourra supporter les insultes quotidiennes subies par les usagers.

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