Grève chez BRINK'S: la solidarité est nécessaire! Une riposte interprofessionnelle s’impose
Par Dominique Waroquiez, Guy Van Sinoy le Lundi, 08 Novembre 2010 PDF Imprimer Envoyer

Cela fait une douzaine de jours que les convoyeurs de fonds de la société BRINK'S sont en grève sur plusieurs sites de Belgique, en Flandre et en Wallonie. Les convoyeurs de BRINK'S ce sont souvent eux (avec ceux du Groupe 4S) qui transportent l'argent des pensions, des magasins, des cinémas (Kinépolis...), des banques (qui ont été renflouées avec l’argent public), des distributeurs..., à leurs risques et périls ! Mais leurs droits sont aujourd'hui menacés par la soif des actionnaires de la multinationale américaine BRINK'S.

BRINK'S veut remplacer leur statut d'employé par un statut d'ouvrier... et ceci alors qu'il est justement question dans les instances syndicales de discuter de l'harmonisation des statuts! Un avant-goût de ce qui attend les syndicats- à savoir un forcing patronal pour une harmonisation vers le bas? Belle époque que celle des parachutes dorés et du renflouement des banques!

En plus, à cause de la gestion patronale défectueuse plusieurs fois dénoncée par les travailleurs de Strépy (une soixantaine de travailleurs dont plusieurs avec une longue expérience de BRINK'S) et leurs syndicats, le site wallon est menacé de fermeture. Mais ce n'est pas le tout, et cela n'est pas assez dit dans les media jusqu'à présent: que deviendront les droits des travailleurs qui ont des années et parfois des dizaines d'années d'ancienneté : cela va-t-il aussi passer à la trappe ? Comme si cela ne signifiait rien, zéro ... Il y a de quoi être inquiet:«On ne sait pas de quoi sera fait demain, je dors mal», nous dit, au piquet, l'épouse d'un travailleur. .

C'est trop! Les droits conquis par les travailleurs méritent qu'on se batte pour les protéger et les garder et donc les travailleurs belges de BRINK'S sont partis en grève fin novembre. Plusieurs réunions de concertation ont déjà eu lieu. Bilan: «Le patronat ne veut rien entendre!». Pour les actionnaires, les travailleurs comptent pour des prunes, et donc logique: la grève se poursuit à Strépy et sur les trois sites en région flamande à Hasselt, Gand et Machelen...

La question entretemps devient peu à peu politique... avec notamment une intervention de la ministre Milquet invitant le patronat à écouter les revendications syndicales. Quant à la ministre Turtelboom, elle a exigé que des fourgons de la Banque Nationale soient escortés par la police fédérale vers les clients de BRINK'S.

Enfin, les aberrations ne manquent pas dans ce bras de fer entre les travailleurs et les actionnaires: Strépy est le seul site installé en Wallonie, s'il ferme une dizaine de travailleurs si pas plus seraient licenciés (avec quel statut et combien d'années d'ancienneté ?), les autres devraient aller travailler dans les sites installés en Flandre d'où partiraient dès lors les convois de fonds sécurisés y compris vers la Wallonie ! Et cela sous prétexte bien sûr de rentabilité. De qui se moque-t-on ?

De plus en plus, chez les travailleurs de la base de Strépy se développe une crainte: qu'est-ce qu'ils veulent, en face? Organiser une «faillite»? Tout cela est inacceptable ! Les grévistes méritent notre solidarité et notre soutien.

Dominique Waroquiez, 7 novembre 2010


Brink’s : Une riposte interprofessionnelle s’impose

L’exigence de la direction de Brink’s de changer le statut des employés est une véritable provocation à l’heure où les organisations syndicales veulent négocier nationalement pour harmonier vers le haut les statuts entre ouvriers et employés. Si le mouvement syndical laisse faire cela, c’est à nouveau la porte ouverte à de nouvelles combines patronales pour précariser encore plus l’emploi. Rappelons que lors de la restructuration récente chez Carrefour, la direction prétendait faire passer le personnel des hypermarchés dans une commission paritaire plus défavorable au personnel.

Face à de tels agissements patronaux, il faut une riposte interprofessionnelle car ce qui est en jeu chez Brink’s, au-delà de la restructuration, est une menace pour tous les travailleurs qui ont un contrat employé. Si le personnel employé de Brink’s est contraint de passer au statut ouvrier, qui dit que demain d’autres secteurs ne suivront pas ?

Attaques insidieuses

Depuis le début de la grève des transporteurs de fonds, les médias parlent surtout du conflit en épinglant le fait que certains distributeurs de billets de banque ne sont plus approvisionnés et surtout, que plusieurs milliers de pensionnés n’ont pas pu toucher leur pension à temps. On nous ressort donc la rengaine des « usagers pris en otage par une grève », alors que les travailleurs de Brink’s ne font que défendre leur emploi et leur statut avec la seule arme dont ils disposent : la grève.

Les attaques insidieuses de la presse contre la grève des transporteurs donne des idées à certains. Ce week-end, l’agression commise contre deux travailleurs de Brink’s qui tenaient le piquet de grève à Strépy est un avertissement que devraient entendre les organisations ouvrières.

Un service d’utilité publique

La ministre de l’Intérieur, Annemie Turtelboom, fait désormais transporter des fonds par les fourgons de la Banque nationale escortés par la police fédérale. C’est une tentative de briser la grève des travailleurs de Brink’s. Mais cette immixtion de la ministre de l’Intérieur dans le conflit soulève pourtant une question intéressante.

Effectivement, à une époque où la plupart des banques ont réduit le nombre de leurs agences et où les usagers n’ont pas d’autre choix que de retirer de l’argent auprès de distributeurs de billets, l’approvisionnement de ces distributeurs revêt de plus en plus un caractère d’utilité publique trop important que pour être confié au secteur privé.

La nationalisation, sans indemnités ni rachat et sous contrôle des travailleurs, des sociétés de transport de fonds et leur regroupement en un service public national de transport de fonds est une alternative à la situation de pourrissement voulue par la direction de Brink’s. Le personnel aurait ainsi la possibilité de choisir entre le statut employé du secteur privé et le statut d’agent (nommé) des services publics. Une nette amélioration par rapport à ce que voudraient imposer les actionnaires de Brink’s avides de dividendes !

Guy Van Sinoy

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